Il y a une histoire avec cette image en couleur. Je l’ai initialement mise dans ma sélection. Elle n’a rien d’exceptionnel en soi mais j’aimais bien les tons et les ombres.
En collectant des feedback j’ai eu des moues silencieuses à cause du contenu. À d’autres je me suis retrouvé à justifier d’avoir pris ce cliché, alors qu’on ne me le demande jamais sur une épaule ou une hanche nue.
J’ai fini par intégrer cette dimension, par me dire que la photo était inappropriée en ce qu’elle montre le pubis et qu’elle n’est pas assez motivée pour ça, puis par la retirer de moi-même de la sélection.
Cette semaine je me suis réveillé et je suis furieux contre moi-même, furieux d’avoir fait cette erreur.
L’image n’a rien d’irrespectueux ou de sulfureux. La modèle ne m’a d’ailleurs remonté aucune gêne en ce sens. J’ai simplement cédé au dictat qui veut que le corps ou certaines parties du corps ne doivent pas être montrées, qu’elles doivent être interdites ou honteuses.
Je suis furieux parce que j’ai amorcé ce projet pour parcourir exactement le chemin opposé, pour déconstruire la honte, l’interdit et la distance avec le corps. Le dictat social d’autrui a repris le dessus sans que je ne m’en rende compte.
Je montre des corps, parfois sur des plans serrés. Je n’en ai pas honte et, si je ne cherche pas à exposer, je ne souhaite surtout pas cacher ou sous-entendre. Il s’agit d’accepter que nous avons tous un corps, l’autre comme moi-même, et de rompre l’interdit ou la honte qui vont avec.
Cette vue n’est et ne devrait pas être plus honteuse ou plus difficile qu’une autre. Elle est même finalement bien plus neutre que la féminine d’il y a quelques jours. Qu’est-ce qui choque tant pour qu’on souhaite ne pas la voir ?
Même après cette mise au point, j’hésite à mettre sur Flickr la seconde image en noir et blanc, faute de vouloir affronter le regard de ceux qui ne liront pas le texte avec.